mardi 16 juin 2020

La maladie de Sachs de Martin Winckler

Il y a quelques années, je lisais Le chœur des femmes. Ce roman, qui a été une révélation pour moi, m'a fait découvrir l'auteur et grandir à bien des titres.
Il a lancé ma veine féministe, d'abord, qui sommeillait un peu trop fort. Et il m'a fait prendre conscience des violences médicales : non, les médecins n'ont pas tous les droits sous prétexte qu'ils le sont. Et oui, les patientes méritent un minimum de douceur et de respect pour les accompagner dans les actes les moins agréables. J'y suis très attentive désormais. 

Forte de cette expérience, c'est avec hâte et curiosité que je me suis lancée dans ce nouveau roman, en lecture commune avec ma femme.


Année d'édition : 2005
Nombre de pages : 659 pages
Genre : contemporaine
Edition : Folio

Synopsis :
" Pourquoi venez-vous me voir, ce soir ? Parce que je ne sais plus quoi faire.
Parce que ça fait trop longtemps que ça dure. Parce que ça ne peut plus durer Parce que je n'ai pas trop le choix, si ça ne dépendait que de moi, vous savez, les médecins, moi, moins j'en vois, mieux je me porte... " Dans la salle d'attente du docteur Bruno Sachs, les patients souffrent en silence. Dans le cabinet du docteur Sachs, les plaintes se dévident, les douleurs se répandent. Sur des feuilles et des cahiers, Bruno Sachs déverse le trop-plaint de ceux qu'il soigne.
Mais qui soigne la maladie de Sachs ?

Mon avis :
Martin Winckler...je crois que maintenant, je pourrais lire n'importe quoi de lui, je partirais toujours avec un a priori positif.
Ce roman est différent du Chœur des femmes. Plus général. Il ne traite pas seulement des actes gynécologiques mais de la médecine dans son ensemble, la médecine généraliste de campagne au sein d'un petit cabinet. Bruno Sachs y est médecin de famille. Il soigne petits et gros bobos, de la piqûre d'orties au cancer en phase terminale. De la douleur physique à l'insidieuse douleur psychologique. Il écoute, il réconforte. Il est là. Il est le confident, la béquille. La voix de la raison, parfois...

Oui, on est à des lieues du noble doc(te) craint et révéré, qui signe des ordonnances (illisibles) à la volée sans explications, sans compassion. Qui lit des résultats d'analyses à la va-vite et soigne des symptômes voire, wouhou, des maladies, mais pas des patient·e·s. 

On sent que pour Sachs, et par extension pour Winckler, les gens comptent (un peu trop, peut-être, à mon avis il doit frôler le burn-out). En témoigne le point de vue de narration choisi, qui n'est autre que celui des patient·e·s eux-mêmes. Elles et ils le tutoient, décrivent ce qu'il fait, interprètent, interrogent. Elles et ils se réjouissent, s'inquiètent, s'offusquent. 
La forme qui en résulte est un peu particulière. Elle tire sur les mémoires, les anecdotes jetées dans un cahier. Ça semble un peu fouillis, au début, cette accumulation de malades, cette succession de consultations. Et finalement, petit à petit, on commence à en reconnaître qu'on a déjà croisé·e·s. On s'attache à certain·e·s, on en déteste d'autres, on a envie de savoir. Parfois, les protagonistes finissent par se croiser, ou plutôt, on comprend qu'ils et elles se connaissent. J'ai mis plus de temps à rentrer dans le texte que dans le précédent roman, mais il faut reconnaître que c'est habile.

Cette lecture a un aspect particulier pour moi. Je travaille en clientèle, dans le domaine médical. J'ai reconnu beaucoup de "profils" : celles qui viennent timidement, avec appréhension. Les fondu·e·s de séries/émissions médicales qui s'imaginent que tout le monde fait une opération à cœur ouvert sur la banquette arrière. Ceux qui ont regardé sur internet, et qui savent que c'est un cancer. Celles qui minimisent, ceux qui en rajoutent. Celles qui veulent pas déranger, ceux qui veulent passer avant tout le monde parce que, eux, c'est une urgence/ils sont pressés. Mais aussi celles qui te témoignent une gratitude folle pour les avoir aidées, ceux qui te ramènent un petit cadeau - c'est pas grand chose - parce que t'as été là... et tous les autres...
Reconnue, aussi, cette tendance à s'impliquer à l'extrême, pour une reconnaissance parfois médiocre. Cette propension à ramener du travail à la maison, sur des notes ou dans la tête, à le ressasser, l'approfondir, à la recherche de LA solution.

D'aucun·e·s trouveront un petit côté pédant à Bruno Sachs. Je comprends ce ressenti. A la lecture, on sent une forte critique des consœurs et confrères qui ne font pas correctement. Qui ne prennent pas le temps d'écouter, qui ne prennent pas en charge la douleur. Le soignant se pose comme celui qui sait, celui qui fait mieux. Mais finalement, si on trouve le Dr Sachs un peu trop fier, n'est-ce pas parce qu'on est habitué·e·s à celles et ceux d'en face ? Parce que ce sont, aujourd'hui encore, notre référence en terme de soignant·e·s ? Car non, ce n'est pas normal d'avoir mal. Et oui, on peut y faire quelque chose. A minima, on peut essayer. 

Hier, j'ai fait vacciner mon poussin. A 4-5 mois, on lui prescrivait des patchs anesthésiants à poser avant. Maintenant qu'elle a presque 1 an, on ne le fait plus. Parce qu'elle est plus résistante à la douleur ? J'en doute. Ça aurait coûté quoi, d'en mettre ? Pas grand chose. Au moins on a du Doliprane pour la fièvre et les douleurs...

Tout ça pour dire qu'encore une fois, Martin Winckler a fait mouche. Encore une fois, ses écrits trouvent un écho inhabituel en moi. Il faut lire Martin Winckler. Lisez-le !


Ici l'avis de ma chère et tendre, qui y a été un peu moins sensible que moi : Dites "Aaarg".

Songe à la douceur de Clémentine Beauvais

Celles et ceux qui me connaissent savent que j'ai assez peu d'attrait pour les romances. J'ai bien eu de bonnes surprises, mais souvent... des déceptions. La dernière en date étant le mémorable Quand souffle le vent du nord. Mais voilà, j'entends parler de Clémentine Beauvais depuis un moment (coucou Camille !) et ce roman en particulier me paraissait très ambitieux et différent !

Année d'édition : 2018
Nombre de pages : 264 pages
Genre : romance
Edition : Sarbacane (Exprim')







Synopsis :
Quand Tatiana rencontre Eugène, elle a 14 ans, il en a 17 ; c’est l’été, et il n’a rien d’autre à faire que de lui parler. Il est sûr de lui, charmant, et plein d’ennui, et elle timide, idéaliste et romantique. Inévitablement, elle tombe amoureuse de lui, et lui, semblerait-il… aussi. Alors elle lui écrit une lettre ; il la rejette, pour de mauvaises raisons peut-être. Et puis un drame les sépare pour de bon. Dix ans plus tard, ils se retrouvent par hasard. Tatiana s’est affirmée, elle est mûre et confiante ; Eugène s’aperçoit, maintenant, qu’il la lui faut absolument. Mais est-ce qu’elle veut encore de lui ? Songe à la douceur , c’est l’histoire de ces deux histoires d’un amour absolu et déphasé – l’un adolescent, l’autre jeune adulte – et de ce que dix ans à ce moment-là d’une vie peuvent changer. Une double histoire d’amour inspirée des deux Eugène Onéguine de Pouchkine et de Tchaikovsky – et donc écrite en vers, pour en garder la poésie.

Mon avis :
Ce roman est une adaptation libre du roman russe Eugène Onéguine, d'Alexandre Pouchkine. Ce dernier m'étant totalement inconnu, je me garderai de faire des comparaisons !

L'histoire est celle d'une deuxième rencontre, 10 ans après la première, franchement ratée et marquée par un événement sombre et tragique. Une décennie qui a permis aux deux protagonistes de ressasser, de spéculer sur les événements de l'époque... et aussi de suivre chacun leur chemin.

L'autrice nous fait découvrir en parallèle le présent et le passé.
Cette romance est somme toute assez classique. Une fois de plus, j'ai du mal à m'identifier aux personnages, qu'on découvre d'abord jeunes.
Lui, Eugène, est un ado désabusé. Tout l'ennuie, la vie n'a aucun intérêt pour lui. D'ailleurs, pour être exact, une seule chose l'intéresse peut-être : l'ennui.
Elle, Tatiana, vit de grandes histoires d'amour par procuration grâce aux classiques littéraires du genre (qu'il faudrait quand même que je lise, d'ailleurs... ça tombe bien, certains sont sur la liste de recommandations que je suis de près).
Elle rêve sa vie, lui vit sans rêves. Evidemment, leur rencontre va provoquer un grand chambardement sentimental et hormonal mutuel.

Je serais probablement plus proche des personnages du présent, notamment dans les passages où Eugène se torture les méninges sur quoi écrire, quand écrire, et imagine les pires scénarios à même de compromettre ses chances.

Petite entorse à ce conformisme romantique : la fin, qui laisse au lectorat le soin de compléter les trous...

Mais ce qui fait l'intérêt de ce livre, ce n'est pas tant l'histoire que la plume. Et ça, pour le coup, j'ai vraiment adhéré. Car la grande particularité de ce livre, c'est l'écriture en vers.
Les mots sont choisis avec soin pour coller au mieux aux émotions des narrateurs, alternant douceur et crudité, langueur et staccato en fonction des moments de torpeur, de rêveries, ou de tension. La lecture est très rythmée, très "musicale".

La mise en page vaut le détour aussi. Originale, travaillée... elle a dû, à mon avis, coûter quelques touffes de cheveux aux éditeurs... Un petit aperçu ci-dessous.



A conseiller à tous les amoureux et amoureuses de romance et à celles et ceux qui auront la curiosité et l'entrain pour se frotter à une forme différente !

lundi 20 avril 2020

Nymphéas noirs de Michel Bussi

Seconde lecture commune avec ma femme et livre choisi pour le book-club local ayant pour thème... "Michel" ! Oui, je sais... L'occasion pour moi de découvrir un auteur dont tout le monde parle et qui dormait dans ma wish-list depuis longtemps, et surtout de renouer avec le roman policier !

Année d'édition : 2015
Nombre de pages : 512 pages
Genre : policier
Edition : Pocket







Synopsis :
Tout n'est qu'illusion, surtout quand un jeu de miroirs multiplie les indices et brouille les pistes. Pourtant les meurtres qui troublent la quiétude de Giverny, le village cher à Claude Monet, sont bien réels. Au cœur de l'intrigue, trois femmes : une fillette de onze ans douée pour la peinture, une institutrice redoutablement séduisante et une vieille femme aux yeux de hibou qui voit tout et sait tout. Et puis, bien sûr, une passion dévastatrice. Le tout sur fond de rumeur de toiles perdues ou volées, dont les fameux Nymphéas noirs. Perdues ou volées, telles les illusions quand passé et présent se confondent et que jeunesse et mort défient le temps.

Mon avis :
C'est toujours difficile à chroniquer, un roman policier. On veut parler de nos hypothèses, mais en même temps il ne faut pas trop en dire pour ne pas gâcher la surprise... pas évident, encore plus dans ce livre. Je vais donc essayer de vous parler de mon ressenti, en bonne funambule, sans me casser la figure dans le spoil qui a remplacé mon filet.

L'histoire se déroule dans un cadre intéressant : Giverny, village élu par Claude Monet et qui a inspiré bon nombre de ses tableaux, en particulier ses Nymphéas. Ne nous voilons pas la face, je suis totalement ignare dans ce domaine. J'ai commencé par râler intérieurement sur le fait que tout tournait beaucoup autour de ça. Et puis, petit à petit, je me suis laissée prendre au jeu, allant même jusqu'à faire des recherches pour voir à quoi ressemblaient les œuvres évoquées, et les lieux visités. Il faut dire que ce petit village s'y prête bien : charme et caractère, on comprend tout à fait les attraits que le peintre a pu y trouver. Un bon point pour ma culture.

Sur le déroulement de l'enquête, j'ai tout de suite été séduite. J'ai immédiatement joué à deviner si les grosses pistes qu'on nous mettait sous les yeux étaient les bonnes ou non. J'en ai discuté avec ma femme (je me sens très Columbo quand je dis ça...), j'ai râlé (encore) sur le fait que si c'était vraiment ça le dénouement, c'était vraiment très très appelé du pied ! L'investigation suit grosso modo trois pistes : celle des maîtresses d'un néo Dom Juan, celle d'un·e enfant mystère et la dernière... d'un trafic d'art, bien sûr. On va, on vient d'une hypothèse à l'autre, on échafaude, on spécule... Nos certitudes sont régulièrement ébranlées et c'est une bonne part de ce qui fait un bon polar.

L'autre part, c'est le dénouement. Et là, je dois dire que je l'ai pris en pleine face. J'étais tellement occupée à surveiller autre chose que je me suis laissée piéger sans problème. Les deux pieds dedans. Il faut dire que c'était bien goupillé, et même si la fin était peut-être un chouille longue, elle m'a bien permis de tout remettre en perspective et de faire la pleine lumière sur les événements.

Côté personnages et propos, je suis restée plus mitigée. 
Le duo d'enquêteurs fonctionne bien : Sérénac incarne le séducteur instinctif, Bénavidès le collectionneur de barbecues méthodique. Les deux se complètent malgré une incompréhension mutuelle, parfois.
Je ne me suis en revanche pas vraiment attachée aux enfants (Fanette, Paul, Vincent...), que je regardais évoluer d'un œil très extérieur. Peut-être, comme ça m'est arrivé dans d'autres romans, parce que leur maturité ne colle pas vraiment à ce que j'imagine d'enfants en école primaire, je ne sais pas...

Mais mon gros bémol, c'est les propos tenus par certains personnages, et le rôle donné à la jolie institutrice. Elle a l'air cultivée, intelligente, mais dès la première rencontre avec Sérénac (souvenez-vous, le séducteur qui marche à l'instinct), elle se transforme en pièce du boucher après 30 jours de jeûne sur Koh Lanta. Le type choisit ses mots juste pour "qu'elle rougisse encore". Les scènes entre les deux ne m'ont pas déplu, la tension sexuelle est intense est bien décrite, mais de là à faire de cette pauvre Stéphanie une pauvre nana qui n'en peut plus de ses hormones... ça tourne parfois au ridicule :


"Stéphanie s'accroche au peuplier, se frotte à lui, se contorsionne comme pour s'essuyer à l'écorce, comme pour épouser sa force."

Là, elle veut juste se nettoyer. J'ai trouvé ça... un poil too much. Mais bon, si même les astres s'y mettent, faut lâcher le morceau.

"Un soleil coquin dévore avec délice ses bras et ses cuisses nus."

Les autres femmes ne sont guère mieux loties, entre le cliché de la potiche ("si ça se trouve, elle se contente dans les vernissages d'offrir du champagne, des boudoirs, et son décolleté derrière une nappe blanche"), ou le cliché du bonhomme ("derrière le volant [de l'autocar], c'est une conductrice. Elle n'a même pas une allure de garçon manqué ou de chauffeur routier" ou encore "elle avait déjà cette sorte d'élégance assez rare chez les fliquettes").

Je ne parlerai pas des éléments que j'ai trouvé un peu grossophobes. Alors je sais très bien qu'il faut dissocier l'auteur des personnages. Ici un flic macho ou une mamie dans l'air du temps, mais du sien. Mais ça faisait un poil trop pour moi. 

Ceci étant dit, j'ai tout de même vraiment apprécié ce polar bien construit, surprenant, et original. J'ai d'ores et déjà repéré d'autres titres de l'auteur qui me tentent beaucoup, comme Maman a tort ou un recueil de nouvelles qui attise bien ma curiosité... nous verrons donc à la prochaine lecture si l'essai sera transformé (les seins seront transformés ?) !

Et comme d'habitude, l'avis de ma moitié par ici : Monet, Monet, Monet, must be funny !

vendredi 3 avril 2020

Idaho d'Emily Ruskovich

J'ai eu une super idée que j'aurais dû avoir depuis bien longtemps... proposer un cycle de lectures communes à ma femme ! J'ai choisi quelques titres dans sa liste, elle dans la mienne, un petit tirage au sort pour déterminer l'ordre, et voilà... nous aurons maintenant toujours en cours un titre commun ! Cette première expérience a été fort agréable et amusante ! Au programme, découverte de la maison Gallmeister avec Idaho.

Année d'édition : 2019
Nombre de pages : 384 pages
Genre : contemporaine
Edition : Gallmeister







Synopsis :
Idaho, 1995. Par une chaude et insouciante journée d'août, Wade, Jenny et leurs deux petites filles, June et May, se rendent dans une clairière de montagne pour ramasser du bois. S'y produit soudain un drame inimaginable, qui détruit la famille à tout jamais. Neuf années plus tard, Wade a refait sa vie avec Ann au milieu des paysages sauvages et âpres de l'Idaho. Mais tandis que la mémoire de son mari vacille, Ann devient obsédée par le passé de Wade. Déterminée à comprendre cette famille qu'elle n'a jamais connue, elle s'efforce de reconstituer ce qui est arrivé à la première épouse de Wade et à leurs filles.

Mon avis :
Cette lecture a été épique, mais pas pour les raisons qu'on pense.
Idaho, c'est avant tout l'histoire d'un homme, Wade, qui oublie la sienne. Touché par une démence familiale précoce, héritage malheureux des générations passées, il perd peu à peu ses souvenirs, et voit son comportement se modifier également, malgré lui.
Ces passages sur la mémoire défaillante ont particulièrement résonné en moi. J'ai reconnu les signes, les astuces pour les contourner, aussi bien du malade que de ses proches.

L'avantage, si on peut en trouver un, c'est que cette démence permet aussi d'oublier les zones les plus sombres de sa propre histoire. Pour Wade, la vie n'a pas été clémente : un drame incommensurable l'a privé de sa femme Jenny, et de ses deux filles, June et May. Lorsqu'il parvient à passer le cap et à refaire sa vie, rien n'est simple pour sa nouvelle compagne, Ann.

Difficile en effet de trouver sa place lorsque les absents sont si présents dans son esprit, et si lointains dans celui de son mari. Des zones de mystère subsistent, nous en découvrons des pièces petit à petit jusqu'à ce que le puzzle semble se mettre en place. La relation entre les deux femmes qui ne se connaissent pas est, paradoxalement, très forte. Jenny obsède Ann. Maintenir son souvenir et celui des deux enfants est un besoin viscéral pour cette dernière. Je suppose que cette idée fixe est exacerbée par l'isolement dans lequel ils vivent, puisque leurs seuls voisins directs sont des dizaines d'arbres à flanc de montagne, et que l'hiver ils ne peuvent même pas redescendre au village le plus proche en voiture.

Le roman est construit de telle façon qu'on voit le tableau couleur par couleur, par le petit bout de la lorgnette. Alternance des époques, des lieux... nous voyageons dans le temps de façon déconcertante. Cette construction (et indubitablement l'étiquette "thriller" qui estampille ce roman sur sa fiche Livraddict...) m'ont fait suivre de nombreuses fausses pistes. J'ai élaboré des hypothèses, fière de moi, certaine d'avoir mis à jour le mystère le mieux gardé de ces 400 pages. Le fait de lire en commun, d'échanger des avis, n'a fait que monter les enchères sur le twist final...

... bon. Il se trouve que tout le monde a été dupé par cette étiquette que j'avais scrupuleusement relayée. Cette histoire, c'est juste celle d'un homme qui a connu l'horreur, qu'il a oubliée, et de sa nouvelle femme qui ne l'a pas connue, mais veut s'en souvenir. Mais c'est bien réalisé !

Plusieurs questions sont soulevées, notamment sur la nécessité ou non de se souvenir de tout, ou la possibilité ou non de tout pardonner. Sur ce qui fait que quelqu'un de calme et bien sous tous rapports peut, un jour, se retrouver à commettre la pire des atrocités... et sur l'espoir dans l'absence d'un être aimé...

Je conseillerais probablement à des amateurs/amatrices de littérature contemporaine. Pas à un lectorat qui ne jure que par le thriller !

L'avis de ma co-lectrice par ici : Idaho chez Sound.

mardi 24 mars 2020

Célestopol d'Emmanuel Chastellière



Le mois d'Emmanuel Chastellière sur Bookenstock avec des interviews passionnantes que vous pouvez retrouver ci-dessous. Passée la timidité, j'ai réussi à poser mes propres questions, yay !



Je vous l'annonçais dans mon précédent article, ce mois m'a permis de découvrir le recueil de nouvelles Célestopol, qui m'a agréablement fait voyager sur la Lune...

Année d'édition : 2019
Nombre de pages : 346 pages
Genre : fantasy, steampunk
Edition : Libretto




Synopsis :
Célestopol, la cité lunaire, la perle de l’Empire Russe, la ville de toutes les démesures, où toutes les technologies de ce XXème siècle naissant se combinent pour créer la métropole ultime. Célestopol, où à chaque coin de rue, la magnificence de ses merveilles architecturales rivalise avec l’éblouissement que provoquent ses automates affectés à mille et une tâches. Célestopol et ses canaux de sélénium dont la brume mordorée baigne en permanence la lumière des réverbères. Célestopol, la ville sous dôme, le défi ultime de l’humanité lancé aux étoiles.

Célestopol la rebelle, l’insoumise. Célestopol, où chaque habitant porte en lui une colère, un amour, une tristesse, une vengeance. Célestopol et son duc extravagant, aux pouvoirs sans limites, dont la simple présence est une insulte adressée à chaque instant à l’autorité de la Tsarine. Célestopol, en quête de liberté et d’émancipation, loin d’une Terre qui menace de sombrer dans les flammes.

Célestopol, la ville qui a arraché un peu de l’âme de toutes les Russies et l’a posé sur la Lune.


Mon avis :
Le format nouvelles est un format que j'apprécie de plus en plus, et l'essai est de nouveau transformé avec ce recueil. 

La particularité de ce dernier, c'est que toutes les nouvelles le composant se passent dans un même univers : la ville sélène de Célestopol. Les personnages pour l'essentiel sont différents d'un texte à l'autre, mais de temps à autre, les destins s'entrecoupent, se croisent, tels des points de repère pour le lecteur. Une exception : l'ambivalent duc Nikolaï, qui règne en maître sur les lieux.

J'ai vraiment trouvé l'ouvrage bien construit. Les différents textes suivent une certaine chronologie, logique, inéluctable. Chacun apporte un éclairage nouveau, un point de vue différent, et les éléments s'emboîtent petit à petit, tel un puzzle. Une cloche qui passe, ou d'autres éléments font subtilement le lien. C'est habile.

Bien sûr, j'ai mes chouchous, dans les personnages (Sergueï et Isidore, par exemple) comme dans les nouvelles (La danse des demoiselles), mais l'ensemble m'a plu, en dépit de certaines fins un peu abruptes inhérentes je le sais bien au format. C'est mon côté qui en veut toujours plus !

L'immersion dans la ville de Célestopol est très convaincante. Au début ville de promesses, investie par des Terrien·nes de tous poils avides d'un nouveau départ, de conquête, de richesse bien sûr... Chacun·e tente de se faire une place. Mais une cité humaine, même sur la Lune, reste humaine : très vite la ville se scinde entre les nanti·e·s et les pauvres, et les réceptions clinquantes s'opposent aux inquiétudes des bas-fonds, survivre...

L'ambiance est très sombre dans ce recueil résolument steampunk, mâtiné de romantisme slave et illuminé par les seules rivières de sélénium. Il puise notamment ses influences dans l'oeuvre de Jules Verne ou China Miéville, mais j'y ai aussi trouvé un côté Wall-E, dans une nouvelle. La ville sous cloche recèle un bon cocktail de thèmes incontournables en SF : boucle temporelle, voyages spatiaux, nouvelle source d'énergie... mais surtout, celui que je préfère, les automates et la frontière entre humain et machine ! Le fantastique fait quelques incursions au détour de quelques pages, tout comme le genre policier, ou même l'aventure... Il y en a pour tous les goûts.

Bonne nouvelle : un nouveau recueil, dont le nom de code est "1922" et se déroulant dans le même univers, est prévu pour bientôt. De quoi retourner sur la Lune, encore pour quelques temps !


dimanche 1 mars 2020

Le mois de... Emmanuel Chastellière sur Book en Stock

C'est un post un peu différent que je vous propose aujourd'hui puisqu'il s'agit d'annoncer le début du nouveau mois de organisé chez Book en Stock !



Il a lieu ce mois de mars et met à l'honneur un auteur que je découvre pour l'occasion...


Emmanuel Chastellière


Le principe est simple : les heureux élus reçoivent un livre et doivent en échange relayer l'événement, lire et chroniquer le précieux, et participer en allant échanger avec l'auteur sur le blog de Dup & Phooka. Plutôt cool hein ?

J'ai donc eu la chance, pour cette première participation, de recevoir Célestopol, un recueil de nouvelles estampillées fantasy ou SF, suivant les sources ! ^^
Je peux d'ores et déjà vous dire que je me suis déjà plongée dans cet univers lunaire plutôt sombre... j'ai hâte de revenir partager mon ressenti avec vous ! 
Et aussi de pouvoir "papoter" avec l'auteur !

Embarquons !